La nouvelle approche devrait permettre d’augmenter le nombre d’autopsies et de rendre la profession de médecin légiste plus attrayante
Le Service de médecine légale de l’hôpital UZ Leuven a été reconnu par la Justice comme le premier institut de médecine légale (IML) du pays. Il s’agit d’un centre d’expertise où les médecins légistes peuvent utiliser les mêmes équipements de haute technologie pour les autopsies et où ils peuvent se professionnaliser et se structurer. L’UZ Leuven réalisera ainsi un tiers des autopsies en Flandre. À terme, il devrait y avoir cinq centres d’expertise de ce type dans tout le pays et cette opération structurée est nécessaire. Actuellement, les autopsies ne sont pratiquées que dans 0,5 à 1 % des décès dans notre pays, ce qui signifie que certains décès suspects peuvent passer inaperçus. De plus, notre pays ne compte qu’une quarantaine de médecins légistes et la profession est devenue moins attrayante. Les IML devraient permettre d’inverser cette tendance.
En cas de décès, il appartient au premier médecin présent d’évaluer s’il s’agit ou non d’un décès « inhabituel » ou suspect qui nécessite une enquête plus approfondie. Dans ce cas, le parquet doit en être informé et un médecin légiste est désigné. En concertation avec le médecin légiste et le laboratoire, le parquet détermine s’il y a lieu de poursuivre l’enquête et de procéder à un examen interne ou à une autopsie pour déterminer la cause exacte et la nature du décès. Dans notre pays, un examen externe est pratiqué dans environ 3 % des décès et une autopsie est effectuée dans 0,5 à 1 % des cas, alors que l’objectif européen recommandé pour les autopsies est de 10 %. Déjà en 2013, la Société Royale de Médecine Légale de Belgique (SRMLB) signalait qu’environ 70 décès suspects étaient passés inaperçus.
Le faible taux d’autopsie peut s’expliquer par l’approche des différents maillons de la chaîne. Les médecins de première ligne qui constatent le décès n’ont souvent pas l’expertise nécessaire pour détecter les indices d’une mort suspecte. Par exemple, de minuscules hémorragies dans les yeux sont difficiles à remarquer, mais peuvent constituer un premier indice de strangulation comme cause de décès. En outre, il n’est pas toujours évident pour les médecins généralistes, qui connaissent la personne décédée et ses proches, de soulever des objections judiciaires et médicales en cas de décès inhabituel.
Lorsque les parquets poursuivent leurs enquêtes, ils ne peuvent faire appel qu’à un nombre relativement limité de médecins légistes. Par conséquent, les médecins légistes sont souvent surchargés. Dans notre pays, environ 40 médecins spécialistes (et assistants en formation) en médecine légale travaillent actuellement comme médecins légistes. La profession est face à de nombreux départs à la retraite et à un flux entrant relativement limité. Pour devenir médecin légiste, il faut suivre une formation approfondie de médecin spécialiste en médecine légale, qui dure au moins 11 ans au total. Au cours de leur carrière, les médecins légistes sont également confrontés à des horaires de travail très irréguliers. Ces facteurs, entre autres, poussent de nombreux futurs médecins à opter pour une autre spécialisation.
Instituts de médecine légale
L’année dernière, il a été décidé qu’il y aurait cinq instituts de médecine légale (IML) dans notre pays, répartis géographiquement dans les hôpitaux universitaires. Cela permettra à terme de mener les enquêtes sur les décès de la même manière dans tout le pays.
Dans ces instituts de médecine légale, les médecins légistes ont accès aux mêmes équipements modernes et de haute technologie, et ce, grâce à un financement supplémentaire. La capacité est également plus importante et l’approche peut être structurée, en étroite collaboration avec les parquets. Les médecins légistes peuvent s’unir et définir les modalités de travail et les régimes de congés. Les centres proposent des formations continues et des stages pour les futurs médecins légistes. Cela permet d’assurer la pérennité de la profession et de garantir l’afflux de nouveaux médecins. L’accent est également mis sur l’accueil des victimes et l’accompagnement humain des familles endeuillées. Cette approche devrait permettre d’augmenter le nombre de médecins légistes, d’augmenter le nombre d’autopsies, d’obtenir de meilleurs résultats et d’augmenter le taux de détection des morts suspectes.
L’année dernière, 2,25 millions d’euros ont été débloqués pour lancer deux projets pilotes d’ici 2024. Suite à l’appel à projets, le SPF Justice a reçu six candidatures. Celles-ci ont fait l’objet d’une étude approfondie au cours de l’été 2023, et l’UZ Leuven a été sélectionné par le jury pour être le premier à lancer un Institut de médecine légale reconnu.
Projet pilote à l’UZ Leuven
Le Service de médecine légale de l’UZ Leuven existe depuis 2006 et a été créé à l’initiative de l’UZ Leuven et de la KU Leuven. En 2022, l’UZ Leuven a réalisé 581 examens externes et 185 autopsies pour les provinces du Brabant flamand et du Limbourg. Grâce à des protocoles de coopération avec les procureurs de Louvain, de Halle-Vilvorde et du Limbourg, il existe une approche structurée et harmonisée des enquêtes sur les décès. Un médecin spécialiste et un médecin spécialiste en formation en médecine légale sont présents 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, et il existe une étroite collaboration avec le service de radiologie pour ce que l’on appelle l’imagerie post-mortem.
Une toute nouvelle salle d’autopsie de haute technologie vient d’être mise en service. Contrairement à l’ancienne salle d’autopsie, le travail numérique y est désormais la norme, les résultats étant immédiatement enregistrés sous forme numérique. Grâce à un écran tactile, les images du scanner peuvent être immédiatement visualisées, analysées et comparées avec les images de la scène de crime. En outre, la salle est équipée d’un système de caméras de haute qualité qui permet de suivre les autopsies à distance. Il est ainsi possible de limiter le nombre de personnes présentes lors d’une autopsie, ce qui réduit considérablement le risque de contamination au niveau des traces.
L’éclairage a également été optimisé, ce qui permet une meilleure imagerie. La salle est équipée d’une pression négative. Grâce à cette pression d’air réduite et à une ventilation nettement améliorée, les médecins légistes, les membres du personnel et les visiteurs tels que les policiers et les magistrats sont mieux protégés contre tout risque de contamination ou d’intoxication. Des machines à laver ont également été installées dans la salle afin que les vêtements et le matériel d’autopsie puissent être nettoyés immédiatement, sans qu’il soit nécessaire de les transporter.
Un tiers des autopsies en Flandre
Le ministre de la Justice, Paul Van Tigchelt, a visité aujourd’hui le Service de médecine légale de l’UZ Leuven, où il a assisté à une visite de la salle d’autopsie. Le professeur Wim Van de Voorde a donné au ministre un aperçu de la nouvelle méthode de travail. Selon l’UZ Leuven, la salle d’autopsie lui permet d’être compétitive au niveau européen. La reconnaissance en tant que premier IML implique une subvention de 474.000 euros en 2023 et de 1.212.000 euros en 2024, ce qui devrait permettre à l’UZ Leuven de préserver le Service de médecine légale et la qualité de ses services à long terme, d’améliorer les services pour la Justice, de pouvoir assurer l’afflux de médecins légistes à long terme, de continuer à fournir les toutes dernières techniques de pointe et de se concentrer encore davantage sur les soins aux victimes en ce qui concerne les proches.
Outre la collaboration avec les parquets, l’UZ Leuven mettra à nouveau ses services à la disposition de la division de Malines du parquet d’Anvers et de la division néerlandophone du parquet de Bruxelles dans un avenir proche. Ainsi, un tiers de toutes les autopsies en Flandre sera réalisé par l’UZ Leuven.
Paul Van Tigchelt, ministre de la Justice : « Notre pays compte environ 40 médecins légistes, ce qui est relativement peu. La profession devient de moins en moins attrayante en raison, entre autres, des horaires irréguliers et des longues années d’études requises. Par conséquent, de nombreux médecins légistes sont surchargés, ce qui n’est pas propice au fonctionnement rapide de la Justice. Pour pérenniser la profession et unifier l’approche dans tout le pays, nous voulons créer cinq instituts de médecine légale (IML). Dans ces instituts, les médecins légistes pourront s’unir, élaborer des régimes de travail, effectuer des stages et utiliser les mêmes équipements de haute technologie. Cela permettra à la profession de mieux résister à l’avenir et d’assurer l’afflux de nouveaux spécialistes. L’UZ Leuven sera le premier IML du pays et est équipé d’une salle d’autopsie ultramoderne. »
Le Prof. Dr Wim Van de Voorde, chef du Service de médecine légale à l’UZ Leuven : « Nous sommes reconnaissants d’avoir été reconnus comme le premier Institut de médecine légale (IML) en Belgique. Grâce au soutien financier supplémentaire et à la reconnaissance de notre service en tant que centre d’expertise, nous pouvons garantir la formation des futurs médecins légistes et experts en médecine légale et contribuer à ce que la spécialité soit utilisée de manière plus professionnelle, plus moderne et plus efficace. Les points problématiques, tels que le manque de médecins légistes et le faible pourcentage d’autopsies pratiquées dans notre pays, seront désormais abordés de manière efficace. Notre service milite depuis des décennies en faveur de l’institutionnalisation. Nous sommes donc extrêmement fiers de participer en tant que centre pilote à cette professionnalisation de la médecine légale afin de contribuer à une justice rapide, humaine et ferme en Belgique. »