La Chambre des représentants a approuvé le nouveau Code pénal ce 22 février 2024. Ce faisant, pour la première fois depuis 1867, notre pays dispose d’un droit pénal entièrement renouvelé. Il reflète les valeurs et les normes contemporaines : ce qui est pour nous admissible et ce qui ne l’est pas, les infractions que la société souhaite voire plus sévèrement réprimées et la manière dont nous appréhendons des notions telles que la réhabilitation et les peines. Outre une structure simplifiée, l’on a misé sur un arsenal plus large pour notamment réprimer plus efficacement, assurer un meilleur suivi des auteurs d’infraction souffrant de troubles psychiatriques, créer de nouvelles incriminations et alourdir les peines pour les violences intrafamiliales, les violences sexuelles et le terrorisme. Le nouveau Code pénal sera bientôt publié au Moniteur belge et entrera en vigueur deux ans après sa publication, afin de laisser à la Justice et à l’ensemble de ses partenaires le temps nécessaire pour s’adapter.
La nécessité d’un nouveau Code pénal
Le Code pénal utilisé par la Justice jusqu’à ce jour a été introduit en 1867 et est largement basé sur le Code Napoléon de 1810. Cela fait des décennies, qu’il est en retard sur les normes sociétales. De nombreuses dispositions, notions et incriminations reflètent la morale du XIXe siècle et ne sont plus compatibles avec ce que les citoyens attendent de la Justice. Les infractions contre les biens, par exemple, sont parfois réprimées plus sévèrement que l’atteinte à l’intégrité physique d’une personne. Celui qui commettait un cambriolage avec vol et viol pouvait, en théorie, être puni plus sévèrement pour le vol que pour le viol. Dans ce domaine, les choses ont déjà changé à la suite de la modification du droit pénal sexuel comme entrée en matière du nouveau Code pénal.
De même, la vision sur les peines contenue dans l’ancien Code pénal est imprégnée d’une logique de répression et de châtiment. Une peine d’emprisonnement et une amende sont associées à chaque infraction, comme solution pour tous les types de d’infractions. Or, la science a depuis reconnu que la peine d’emprisonnement ne constitue pas toujours la peine la plus efficace pour les infractions moins graves. Elle peut en effet s’avérer contre-productive, avec pour conséquences que les personnes condamnées se réhabilitent moins bien, voire pas du tout. Ce faisant, la société n’en devient pas plus sûre.
Le fait que le Code pénal actuel soit si daté pose de nombreux problèmes dans la pratique. Ainsi, dans l’ancien Code pénal, les infractions sont subdivisées en contraventions, délits et crimes, mais cette distinction est depuis longtemps dépassée. En outre, en raison du principe de correctionnalisation, de nombreuses peines énoncées dans le Code pénal ne correspondent pas aux peines effectives qui peuvent être infligées. Ce qui nuit à la clarté de ce document fondamental.
Un grand nombre d’incriminations sont également tombées en désuétude et ne font plus l’objet de poursuites depuis longtemps. À titre d’exemple, on peut citer les infractions suivantes : « troubler l’ordre public dans les marchés ou les halles aux grains » et « se rendre coupable de fraude dans le choix des échantillons destinés à la vérification du titre et du poids des monnaies d’or et d’argent »
Des modifications successives ont été apportées au Code pénal au cours du siècle et demi écoulé, créant ainsi une mosaïque de modifications de loi et de nouvelles lois visant à permettre de continuer à utiliser les règles dépassées. De ce fait, le Code pénal est devenu un ensemble complexe difficile à décoder, même pour les experts, et pour le moins illisible pour les citoyens.
Résultat du travail d’un grand nombre d’acteurs
Tout au long de l’histoire belge, plusieurs tentatives ont été entreprises pour parvenir à élaborer un nouveau Code pénal. Ainsi, des commissions scientifiques ont été nommées au cours des périodes 1976-1979, 1983-1985, 2000-2003 et en 2015. Lors de cette dernière tentative, sous le ministre de la Justice de l’époque, Koen Geens, une base importante avait déjà été jetée par la Commission de réforme du droit pénal, composée des experts en droit pénal Joëlle Rozie, Damien Vandermeersch et Jeroen De Herdt. Au début de la législature actuelle, les membres de la commission d’experts susmentionnée ont été reconduits dans leur mission par l’ancien ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne. Les experts ont poursuivi le travail sur cette base. Dans ce cadre, le Livre Ier, qui fixe les dispositions générales du droit pénal, et le Livre II, qui traite des différentes dispositions pénales, ont été réécrits.
Cette démarche a débouché sur les projets de loi relatifs au Livre Ier et au Livre II, qui ont été approuvés par le Conseil des ministres en deuxième lecture, respectivement en mai et en juillet 2023. Ces projets de loi ont ensuite été déposés au parlement fédéral. Après des auditions et des discussions approfondies, les Livres Ier et II ont été approuvés en deuxième lecture par la Commission de la Justice du parlement fédéral, respectivement le 16 janvier 2024 et le 23 janvier 2024.
Le 22 février, ces deux Livres ont été approuvés ensemble en séance plénière. Le projet de loi introduisant la mesure de sûreté, qui est indissociable du Code pénal, a également fait l’objet d’un vote.
Le nouveau Code pénal entrera en vigueur précisément deux ans après sa publication au Moniteur belge.
Qu’est-ce qui va changer ?
1. Subdivision en huit niveaux
Le livre Ier du Code pénal contient les dispositions générales et les principes généraux de droit. Le Livre II contient l’énumération des infractions. Il a été opté pour une structure cohérente dans laquelle il n’y a plus de peine distincte prévue pour chacune des infractions. En effet, l’on travaille avec huit niveaux de peines qui sont décrits dans le Livre Ier. Dans le second, les différentes infractions sont reliées aux niveaux de peine contenus dans le Livre Ier.
Le point de départ était de prévoir davantage de peines sur mesure et de n’envisager la peine d’emprisonnement qu’en dernier recours, en tant qu’ultime remède. L’emprisonnement n’est plus considéré comme la solution à tout, mais comme l’une des peines possibles. Cela se reflète dans les niveaux de peine et dans les types de peines que le juge peut prononcer (voir infra).
Pour les infractions relevant du niveau 1, à savoir pour les plus légères, des peines d’emprisonnement ne sont plus possibles. Sont concernées notamment l’outrage, la calomnie, la violation du secret des lettres, l’incendie involontaire, les formes moins graves de vandalisme, etc. Il s’agit de faits pour lesquels les scientifiques s’accordent à dire que les peines d’emprisonnement ne servent à rien, voire qu’elles causent davantage de tort et augmentent le risque de récidive. Dans ces cas, d’autres formes de sanctions peuvent mieux contribuer à traiter les causes sous-jacentes chez la personne condamnée, pour ainsi éviter qu’elle ne retombe dans le même comportement criminel. Pour ces infractions, le juge doit donc recourir à d’autres sanctions, telles que la peine de travail, l’amende, la peine de probation, la confiscation ou autres.
De même, pour les infractions de niveau 2, telles que les pratiques de marchands de sommeil, le vol avec effraction, la violation de domicile, la violation du secret de l’enquête ou les faux en écriture, la peine d’emprisonnement ne constitue plus le point de départ. Une peine d’emprisonnement de six mois à trois ans reste toutefois possible. Si le juge inflige une peine d’emprisonnement, il doit justifier pourquoi l’objectif de réhabilitation ne peut être atteint par un autre type de peine. Le juge doit s’assurer que la peine choisie est aussi efficace que possible afin de minimiser le risque de récidive.
Pour des faits plus graves liés aux niveaux 3 à 8, la peine d’emprisonnement reste toutefois la peine principale.
Les infractions de niveau 3, punies d’une peine d’emprisonnement de 3 à 5 ans, sont notamment le vol avec violence ou menace, l’extorsion, l’abus de confiance, l’escroquerie, le blanchiment d’argent et la corruption publique.
Les infractions de niveau 4, assorties de peines d’emprisonnement de 5 à 10 ans, comprennent, entre autres, l’enlèvement, la torture, la participation à une organisation criminelle en tant que dirigeant, l’apologie du terrorisme et le trafic illégal d’organes.
Les infractions de niveau 5, assorties de peines d’emprisonnement de 10 à 15 ans, comprennent notamment les vols à main armée, les prises d’otages et les incendies criminels dans des immeubles où l’incendiaire peut soupçonner la présence de personnes.
Les infractions de niveau 6, assorties de peines d’emprisonnement de 15 à 20 ans, comprennent la direction d’un groupe terroriste, le viol sur mineur et l’écocide.
Les infractions de niveau 7, punies de 20 à 30 ans de réclusion, visent, entre autres, les homicides, les violences sexuelles ayant entraîné la mort et la torture ayant entraîné la mort.
Les infractions de niveau 8, le niveau le plus élevé, sont punies de la réclusion à perpétuité. Il s’agit notamment des infractions d’assassinat, de meurtre intrafamilial, de génocide et de crimes contre l’humanité.
Les infractions commises en présence d’éléments aggravants entraînent une augmentation du niveau de peine. La commission d’une infraction dans le cadre de laquelle la victime est mineure, il y a des blessés ou des tués ou la victime est dans une situation de vulnérabilité sont quelques exemples d’éléments aggravants. A titre d’exemple, l’infraction de base de viol est passible d’une peine de niveau 4, mais si le viol est commis sur un mineur de plus de 16 ans par exemple, il sera passible d’une peine de niveau 5. Si cette infraction est commise sur un mineur de moins de 16 ans ou sur une personne vulnérable, elle sera punie d’une peine de niveau 6. Si le viol a entraîné la mort, il sera puni d’une peine de niveau 7.
En cas de récidive, c’est-à-dire de deuxième condamnation pour le même type de faits, le degré de peine peut être augmenté d’un niveau. Dans un certain nombre de cas énumérés dans la loi, pour les infractions les plus graves, le juge sera obligé, au moment de déterminer la peine, de prendre en compte le fait que l’auteur de l’infraction a déjà été condamné auparavant.
Ensuite, il existe également des facteurs aggravants. Il s’agit des éléments du dossier que le juge doit prendre en considération pour prononcer une peine plus lourde au sein du même niveau de peine.
2. Un arsenal plus large pour punir plus efficacement
Les scientifiques s’accordent à dire que les peines sur mesure assurent une meilleure réhabilitation des auteurs d’infraction et réduisent la récidive. Exemple, une étude de VIAS a montré que les contrevenants qui sont obligés de suivre une formation récidivent 41 % moins souvent.
Le juge dispose donc de plus d’options pour prononcer des peines sur mesure. Ces différentes peines peuvent être infligées soit en tant que peine principale, soit en tant que peine accessoire en plus de l’emprisonnement. Il existe toutefois des exceptions, par exemple en cas d’assassinat ou dans certains cas de violence sexuelle où des peines de probation, des peines de surveillance électronique ou de travail ne pourront pas être infligées.
La peine de travail est rendue plus largement applicable. Davantage de peines de probation peuvent être infligées, comme l’obligation de suivre des cours de maîtrise de l’agressivité, l’admission dans un centre de traitement des dépendances, le travail au contact de victimes (de la route) et autres. Il a été scientifiquement prouvé que ce genre de peines amènent plus efficacement les délinquants à regretter leur comportement et, de ce fait, protègent mieux la société contre la récidive.
Est également instauré, le traitement obligatoire sous de privation de liberté pour lequel le consentement du prévenu n’est pas requis (voir point 3)
Le juge pourra également infliger une amende en fonction de l’avantage financier attendu ou tiré de l’infraction. A ne pas confondre avec la confiscation qui existe déjà.
Le champ d’application des sanctions accessoires qui existent déjà, telles que l’interdiction professionnelle ou l’interdiction de conduire, est étendu à un plus grand nombre d’infractions. Ces peines accessoires peuvent être infligées dès qu’il y a un lien avec les infractions. Sont concernées les personnes qui ont abusé de leur profession ou de leur véhicule pour commettre une infraction. Le juge peut également imposer la fermeture d’un établissement comme sanction.
Le champ d’application de l’interdiction de résidence, de lieu et de contact a également été étendu à tous les types d’infractions.
3. Un meilleur suivi des auteurs souffrant de troubles psychiatriques
L’ancien Code pénal part du principe que la responsabilité est une notion binaire. Soit l’auteur est déclaré coupable et peut être condamné à une peine (de prison), soit la personne concernée est jugée irresponsable de ses actes et doit être internée.
Cependant, un grand nombre d’auteurs souffrant de troubles psychiatriques n’entrent dans aucune de ces deux catégories. Leur responsabilité est atténuée, mais pas au point qu’ils ne devraient pas avoir à supporter les conséquences pénales de leurs actes. C’est pourquoi le traitement obligatoire sous privation de liberté a étéinclus comme nouvelle peine dans le projet de nouveau Code pénal. Cette peine, par exemple pour les auteurs souffrant de troubles sous-jacents, est purgée dans un établissement médico-légal fermé.
Pour les auteurs dont on estime qu’ils présentent encore un risque élevé de récidive après avoir purgé leur peine d’emprisonnement, l’ancien Code pénal prévoit un système de mise à disposition du tribunal de l’application des peines pour une période définie. Cela signifie que le tribunal de l’application des peines peut décider de garder une personne en prison ou sous surveillance plus longtemps, même si la peine d’emprisonnement a expiré. La mise à disposition obligatoire s’appliquera désormais également aux cas de viols sur mineurs, en plus des catégories déjà existantes.
À terme, lorsque le circuit médico-légal disposera d’une offre suffisante, le système de mise à disposition sera remplacé par le principe du suivi prolongé après la fin de la peine. Ce suivi prolongé est axé sur le traitement et doit être effectué en dehors de la prison, mais dans un établissement fermé. Le suivi prolongé peut être ordonné par un juge pour les infractions de niveau 3 ou plus et sera obligatoire dans les mêmes cas que pour la mise à disposition.
Autre nouveauté : la mesure de sécurité qu’un juge peut imposer en plus de la peine d’emprisonnement et de la mise à disposition (ou d’un suivi prolongé ultérieur). En effet, la mise à disposition est toujours d’une durée déterminée. La mesure de sécurité est destinée aux meurtriers atteints de troubles psychopathiques ou aux violeurs en série pour lesquels il n’existe actuellement aucun traitement efficace, mais qui ne répondent pas non plus aux critères d’internement. Ces types d’auteurs présentent un risque élevé de récidive après leur libération. S’ils étaient libérés, la société serait gravement menacée. La mesure de sécurité doit être exécutée dans un établissement psychiatrique fermé, tel qu’un centre de psychiatrie légale (CPL). C’est la chambre de protection sociale (CPS) qui juge de l’application de la mesure de sécurité. La société bénéficie ainsi d’une protection supplémentaire.
Il s’agit d’un projet de loi distinct, avec entrée en vigueur immédiate, qui ne peut être séparé du Code pénal et qui a été approuvé par l’assemblée plénière du Parlement fédéral en même temps que les Livres Ier et II du Code pénal.
4. Nouvelles incriminations et aggravation des peines
Les incriminations et le montant des peines décrits dans le Livre II ont été adaptés aux valeurs et aux normes contemporaines.
Dans le nouveau droit pénal sexuel, le volet qui a été inséré depuis le 1er juin 2022 dans l’ancien Code pénal, les définitions des différentes formes de violence sexuelle sont formulées de manière claire et précise, de sorte qu’il ne peut plus y avoir de confusion ou d’ambiguïté. Le consentement est devenu le concept central et il y a infraction en cas d’absence de consentement. Le consentement peut être retiré à tout moment. Les termes dépassés ont été modernisés, tels que « attentat à la pudeur », par exemple, qui a été remplacé par « atteinte à l’intégrité sexuelle ». Là aussi, il y a infraction non plus uniquement en cas de contrainte ou de violence, mais dès qu’il y a absence de consentement. Les définitions ont été modernisées, comme le voyeurisme par exemple, et de nouveaux termes ont été ajoutés, tels que le stealthing et le spiking.
De plus, les peines pour violences sexuelles ont été renforcées. Notre société souhaite, à juste titre, que les violences sexuelles soient sévèrement punies. Le viol est puni d’une peine de niveau 4, soit de 5 à 10 ans d’emprisonnement. Auparavant, la peine était comprise entre 1 mois et 5 ans d’emprisonnement. Les éléments aggravants, telles que la séquestration, le contexte intrafamilial, la minorité de la victime ou son état de vulnérabilité, entre autres, donnent lieu à un niveau de peine plus élevé.
Cette conception du droit pénal, selon laquelle les infractions contre les personnes sont considérées comme plus graves que les crimes contre les biens, est maintenue. Ces infractions sont également mises en avant dans le Livre II. Ainsi, les violences intrafamiliales sont également plus sévèrement punies. L’incrimination de meurtre intrafamilial a été introduite, ce qui est assimilé à l’assassinat et entraîne une peine de niveau 8. Pour diverses infractions telles que la torture ou les traitements inhumains et dégradants, le montant de la peine est toujours augmenté d’un niveau si l’infraction a lieu dans un contexte intrafamilial, ce qui constitue un élément aggravant. Cela s’applique également lorsqu’un ex-partenaire est impliqué dans les faits. La violence entre partenaires peut également être punie plus sévèrement si elle se produit en présence d’un enfant.
Étant donné que la discrimination peut se manifester de différentes manières, le mobile discriminatoire est désormais prévu comme éventuel facteur aggravant pour chaque infraction. Les motifs de discrimination existants dont notamment la couleur de peau, les convictions religieuses, le handicap, l’orientation sexuelle ou le changement de sexe sont à présent étendus à l’identité et à l’expression de genre, entre autres.
L’incitation au suicide sera désormais punissable. L’incitation peut être de nature psychique ou matérielle. Psychique lorsque, par exemple, l’on persuade une personne de mettre fin à ses jours ou matérielle lorsqu’on fournit une arme à une personne sachant qu’elle a des idées suicidaires, par exemple. Cette infraction est passible d’une peine de niveau 2, mais là encore, il existe différents éléments aggravants, tels que la minorité de la victime, entre autres.
Le terrorisme seraégalement puni plus sévèrement. Entre autres, la participation à un groupe terroriste sera passible de 5 à 10 ans de prison (niveau 4) au lieu de 1 mois à 5 ans. La participation à des décisions au sein d’un groupe terroriste sera passible d’une peine pouvant aller jusqu’à 15 ans de prison (niveau 5) au lieu de 10 ans. La préparation d’une infraction terroriste sera également passible d’une peine de niveau 5 au lieu des 5 ans actuels. La peine pour l’incitation au terrorisme – ou la formation de personnes à commettre un acte terroriste – sera portée à un maximum de 15 ans (niveau 5) au lieu d’un maximum de 10 ans. En outre, l’apologie du terrorisme est punissable d’une peine de niveau 4. La règle générale veut que les peines soient systématiquement alourdies d’un niveau si le mobile de l’infraction est de nature terroriste.
La violence à l’encontre des personnes investies d’une fonction sociétale sera punie plus sévèrement. Il s’agit notamment des policiers, des secouristes, des agents pénitentiaires, des médecins, des prestataires de soins de santé, des accompagnateurs de train, des chauffeurs de bus, des avocats, des journalistes et d’autres personnes exerçant une fonction publique. Plus précisément, les infractions seront punies d’une peine d’un niveau supérieur si elles sont commises à l’encontre de l’une de ces personnes. La rébellion entraînant au moins un jour d’incapacité de travail pourra également être punie plus sévèrement. Dans ce cas, une peine de niveau 2 est prévue, pouvant aller jusqu’à 3 ans d’emprisonnement. S’il s’agit d’une rébellion armée, c’est le niveau 3 qui s’applique et donc des peines d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à 5 ans. Cette mesure a déjà été introduite début 2024 dans l’ancien Code pénal avec effet immédiat, faisant qu’elle est entre-temps déjà en vigueur.
Les dispositions relatives à l’espionnage et à l’ingérence étrangère étaient désespérément dépassées dans l’ancien Code pénal. Des notions telles que « en temps de guerre » et « l’ennemi » faisaient que certains actes d’espionnage et d’ingérence étrangère n’étaient pas punissables pour la simple raison que notre pays n’était pas officiellement en état de guerre. Or, la réalité géopolitique multipolaire est devenue beaucoup plus complexe. Les articles ont donc été adaptés au contexte international actuel. L’espionnage et l’ingérence étrangère en temps de paix sont respectivement passibles de peines de niveau 4 et de niveau 3. Des éléments aggravants tels que la corruption ou l’extorsion, par exemple, peuvent entraîner des sanctions plus lourdes. La notion d’ingérence ayant été élargie aux relations internationales, il ne peut y avoir de discussion quant à l’ingérence clandestine dans les institutions européennes sur notre territoire ou au sein de l’OTAN. Influencer clandestinement les processus démocratiques dans notre pays, à l’insu du gouvernement et dans le but de nuire aux intérêts nationaux, sera également passible de poursuites au titre de la définition de l’ingérence.
Parmi les autres nouvelles incriminations figurent la profanation de cadavre, qui vient s’ajouter à l’infraction existante de violation de sépulture (niveau 2), l’intrusion dans un véhicule (niveau 2), la production et la distribution de manuels pour pédophiles (niveau 4), les jets d’objets par-dessus les murs ou les clôtures d’une prison ou d’un établissement fermé (niveau 2) et le fait d’équiper et de posséder un véhicule avec un compartiment caché (niveau 2 ou 3). Ces deux dernières infractions ont également insérées dans l’ancien Code pénal et sont donc déjà entrées en vigueur.
Par ailleurs, dans le nouveau Code pénal, la lèse-majesté ne sera plus passible d’une peine d’emprisonnement. La définition a été assimilée à celle d’outrage envers les personnes physiques. Il doit donc y avoir une intention de faire outrage au roi pour qu’il puisse être question d’une infraction. Cette infraction est sanctionnée d’une peine de niveau 1.
5. Infractions supprimées du droit pénal
Les infractions pénales tombées en désuétude ou ne correspondant plus aux normes contemporaines ont été supprimées du Code pénal. Par exemple, le nouveau Code pénal sexuel décriminalisait déjà le travail sexuel.
De même, des faits qui paraissent aujourd’hui absurdes ou pour lesquels il ne semble plus nécessaire de les punir ne figureront plus dans le Code pénal. Il s’agit, par exemple, de souiller des vêtements, de donner un titre de noblesse à quelqu’un qui n’y a pas droit, de troubler l’ordre public dans les marchés ou les halles aux grains ou encore la fraude dans le choix des échantillons destinés, en exécution de la loi monétaire, à la vérification du titre et du poids des monnaies d’or et d’argent, la publicité des noms des personnes qui s’engagent sur le « Mont de la Miséricorde », les officiers militaires qui continuent à utiliser leurs titres après leur carrière sans les faire précéder de la mention « retraité » ou « honoré », le port d’insignes d’honneur d’un ordre étranger sans l’autorisation du roi et bien d’autres choses encore.
6. Nouvelles règles pour les personnes morales
De nouvelles règles s’appliquent également aux personnes morales dans le nouveau Code pénal. L’imposition d’amendes ne se fera plus à l’aide d’un système de conversions complexes. Les mêmes amendes comprises dans les huit niveaux de peines pour les personnes physiques s’appliqueront aux personnes morales. Contrairement aux personnes physiques, les amendes resteront la principale sanction pour les personnes morales, mais il sera possible de différencier davantage les peines.
Par analogie avec la peine de travail pour les personnes physiques, une peine de prestation de services est également prévue pour les personnes morales. Il s’agit d’une obligation de fournir certains services en contrepartie au profit de la communauté. Il s’agit, par exemple, de l’obligation d’assainir une zone en cas de pollution grave. De même, la peine de probation est applicable aux personnes morales et peut donc obliger une entreprise à respecter des conditions. Le tribunal peut également imposer la fermeture d’un établissement ou l’interdiction de certaines activités.
7. Décimes additionnels, abolition de la correctionnalisation et liste positive pour les assises
Les peines pécuniaires mentionnées dans l’ancien Code pénal n’étaient pas directement applicables. Elles devaient d’abord être converties de francs belges en euros, puis multipliées par des décimes additionnels afin de ramener les amendes aux montants actuels. Les montants repris dans le nouveau Code pénal seront déjà corrects et il ne sera donc plus nécessaire de les convertir.
En outre, l’ancien Code pénal prévoyait que tous les crimes, comme par exemple l’assassinat, le meurtre, le viol et la tentative de meurtre, devaient être traités par un jury d’assises. Il a rapidement été dérogé à cette règle et certains crimes, comme la tentative de meurtre ou le viol, ont été réduits à des délits en adoptant des circonstances atténuantes. C’est ce que l’on appelle la correctionnalisation, une mesure technique qui consiste à saisir un tribunal correctionnel pour ces crimes. Cependant, cela implique que les fourchettes de peines telles que décrites dans le Code pénal ne correspondent pas aux peines réelles. Pour déterminer les peines minimales et maximales réelles, il fallait donc utiliser un tableau de conversion complexe.
La répartition obsolète en contraventions, délits et crimes est donc supprimée, de même que le principe de la correctionnalisation quasi-automatique des crimes. Une liste positive sera utilisée pour déterminer les affaires qui doivent bel et bien être traitées par la cour d’assises. Il s’agit de tous les crimes de niveau 8 (comme l’assassinat) et de plusieurs crimes de niveau 7. Ainsi, les mesures de condamnation utilisées dans le nouveau Code pénal seront directement applicables et compréhensibles pour tous les citoyens.
Le ministre de la Justice, Paul Van Tigchelt : « Le nouveau Code pénal a nécessité des années de travail et est le fruit du travail d’un grand nombre d’acteurs. C’est la dernière partie du contrat que nous concluons les uns avec les autres : ce que nous défendons en tant que société, ce qui est autorisé et ce qui ne l’est pas. Le Code pénal actuel était devenu une maison désuète avec de nombreuses arrière-cours. Nous le remplaçons par un système simple et cohérent à huit niveaux. Il constitue également une avancée importante pour les victimes, avec des peines plus sévères pour les infractions d’atteinte à l’intégrité physique telles que la violence sexuelle, la violence intrafamiliale et le terrorisme. Nous intégrons également davantage de garanties pour protéger la société contre les personnes souffrant de problèmes psychiatriques dangereux. Et nous partons des connaissances scientifiques pour établir les peines qui fonctionnent le mieux. »
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